Les entourloupes du Conseil Constitutionnel

Les entourloupes du Conseil Constitutionnel

lettre à entête du conseil constitutionnel

Pour rejeter une saisine directe du Conseil Constitutionnel en date du 7 juillet 2021, ce dernier se fonde sur le fait que le Conseil d'Etat prétendrait avoir égaré un courrier recommandé qu'il a reçu le 6 avril 2021, alors que la loi prévoit précisément que c'est lorsque le Conseil d'Etat est défaillant pendant 3 mois que l'on peut saisir le Conseil Constitutionnel

Texte rédigé le 16 août 2021

La procédure de la Question Prioritaire de Constitutionnalité : possibilité de contourner le filtrage du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation

Une question prioritaire de constitutionnalité permet de saisir le conseil constitutionnel d'une question relative à la conformité d'un texte de loi à la constitution.
On peut en déposer devant toute juridiction, les conditions de forme semblent souples : il suffit que la question soit dans un document séparé.
Cependant pour que le conseil constitutionnel soit effectivement saisi, c'est le parcours du combattant puisqu'il faut passer par le filtre de la Cour de cassation ou du Conseil d'Etat.
Plus exactement, il existe un seul cas de figure méconnu, où l'on peut saisir directement le conseil constitutionnel d'une QPC : c'est quand le Conseil d'Etat ou la Cour de cassation ont été saisi d'une QPC mais ont omis de statuer dans le délai de 3 mois.
Cela est prévu par les articles 23-4 et 23-7 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le conseil constitutionnel.
L'article 23-5 troisième alinéa prévoit explicitement que ce délai de 3 mois court à compter de la présentation du moyen.
J'ai exercé cette possibilité le 12 mai 2021 concernant des QPC que j'avais soumises le 14 septembre 2020 à la Cour de cassation.
Dans cet article, je vais parler d'un autre exercice de cette procédure à savoir une saisine directe du conseil constitutionnel le 7 juillet 2021 d'une QPC portant sur l'article L522-3 du code de justice administrative que j'avais invoqué devant le Conseil d'Etat en appui d'une requête en rectification début avril 2021.

La procédure devant le conseil d'état

Par une ordonnance notifiée le 29 décembre 2020 antidatée au 21 décembre 2020, le Conseil d'Etat rejette une de mes requêtes de référé liberté tendant à suspendre des mesures liberticides et inefficaces soit-disant destinées à endiguer l'épidémie en invoquant, comme d'habitude, le défaut d'urgence de ma requête après l'avoir caricaturé et sans statuer sur les QPC en appui ni examiner l'urgence de ladite QPC. Le juge des référés se fonde pour cela sur les dispositions de l'article L522-3 du code de justice administrative.
Le 30 novembre 2020, je forme, via l'application Télérecours, une requête en rectification et omission de statuer à l'encontre de cette ordonnance, la jurisprudence du Conseil d'Etat permettant en principe un réexamen d'une affaire dans des cas assez larges.
Le 14 janvier 2021, je rédige une QPC portant sur l'article L522-3 du code de justice administrative pour appuyer mon recours.
Mais il y a un problème : mon recours déposé le 30 décembre 2020 n'est toujours pas enregistré (il ne sera enregistré sous le numéro 454156 que le 2 juillet 2021 !) et l'application Télérecours ne permet pas d'ajouter de documents tant que le Conseil d'Etat n'enregistre pas le dossier.
Le 1er avril 2021, j'envoie une lettre recommandée au Conseil d'Etat pour lui demander d'enregistrer mon recours et je joins en appui une QPC portant sur l'article L522-3 du code de justice administrative, l'accusé de réception mentionne bien que ce courrier a été reçu le 6 avril 2021 par le Conseil d'Etat.
Cette question remet en cause la pratique du Conseil d'Etat de rejeter des Questions Prioritaires de Constitutionnalité sans même les examiner ou regarder si elles sont urgentes.
accusé de réception conseil d'état
Le 2 juillet 2021, le conseil d'état enregistre enfin mon dossier mais la QPC envoyée par courrier n'y figure toujours pas,
je la rajoute donc via Télérecours ainsi qu'une autre question quelques jours plus tard portant également sur l'article L521-2 du code de justice administrative.

La procédure devant le conseil constitutionnel

Le 7 juillet 2021, je saisis directement le conseil constitutionnel de la question de la conformité à la constitution de l'article L522-3 du code de justice administrative
En effet, le Conseil d'Etat a bien reçu la question le 6 avril 2021 en appui de ce dossier et n'a toujours pas statué alors qu'il aurait dû le faire dans le délai de 3 mois.
Je relevais dans ma saisine la pratique anachronique du juge des référés du Conseil d'Etat qui n'a strictement rien compris au concept de Question Prioritaire de Constitutionnalité : il lui est impossible d'invoquer un article de loi dont la conformité à la constitution est contesté par une QPC sans statuer au préalable sur la QPC, sauf si celle ci n'est pas dans un courier séparé.
Cependant, comme on peut le voir dans une ordonnance du 7 juin 2021, ce juge invoque l'article L522-3 pour rejeter un recours et des QPC dont l'une portait sur ce même article L522-3.
Ces décisions du Conseil d'Etat sont habituelles : ces juges font du copier-coller en permanance sans réfléchir.
Le 13 juillet 2021 (ordonnance notifiée le 20/07/2021), le Conseil d'Etat rejette la requête sans statuer sur les QPC, mais c'est trop tard : le conseil constitutionnel avait été saisi entre-temps
Le Conseil Constitutionnel semblait donc valablement saisi de la question mais dans un courrier du 11 août 2021 (reçu le 16/08/2021) émanant du secrétaire général, il estime qu'il n'est pas valablement saisi :
Les raisons de ce rejet sont totalement hallucinantes :
le Conseil d'Etat aurait égaré la lettre recommandée avec la QPC qu'il a reçu le 6 avril 2021, comme son cachet le prouve sur l'accusé de réception,
La copie intégrale de ce courrier avec l'accusé de réception avait été produit au Conseil Constitutionnel.
Le fait que le Conseil d'Etat n'ait pas statué est l'unique condition pour pouvoir saisir le conseil constitutionnel, c'est incroyable que ce droit ne soitn pas possible au prétexte que le Conseil d'Etat a égaré ce courrier.
Ce n'est pas à moi de supporter les défaillances du Conseil d'Etat, le fait qu'il soit défaillant était justement la condition pour que je puisse saisir le Conseil constitutionnel.
Sur le fond, on se demande bien comment on peut faire pour vérifier la conformité à la constitution de cet article L522-3 du code de justice administrative alors même qu'il ne peut être invoqué qu'en référé et lorsque l'on fait une QPC portant sur cet article, il rejette le recours sans statuer sur la QPC en invoquant l'article L522-3
Le Conseil d'Etat semble irrécupérable et le Conseil Constitutionnel ne vaut pas mieux.

L'histoire est elle finie ?

On pourrait croire que cette affaire est enterrée, le conseil constitutionnel n'examinera pas la conformité à la constitution de cet article L522-3 du code de justice administrative.
Rien n'est moins sûr car j'ai également saisi le conseil constitutionnel le 3 juillet 2021 de cette question dans une autre procédure devant le conseil d'état, la question avait été déposée via l'application Télérecours le 14 janvier 2021, là encore, le conseil d'état n'avait pas statué sur cette question dans le délai de 3 mois et n'a toujours pas statué malgré une relance formée en avril 2021.